DES PANSEMENTS POUR COLMATER LE TEMPS
NAU> Comment et pourquoi as-tu commencé à investir la rue ?
JIM : Dessinateur et peintre dans mes études, j’ai commencé par y faire des graffs. Puis je suis vite passé au pochoir, plus rapide d’exécution et qui me permettait de peaufiner mon dessin comme je l’entendais en atelier. C’est ensuite, que j’ai été passionné par la sculpture du volume et le choix plus large de propositions que cela m’offrait pour m’exprimer !
> D’où t’es venu l’idée des pansements?
En fait, en me baladant dans les rues de Paris, je me disais qu’il y avait un sacré fossé entre les restaurations faites sur certaines architectures par rapport à d’autres. J’ai eu le sentiment d’une ville musée, comme botoxée par endroit… Le rue est vivante comme nous, d’où l’utilisation (qui en devient burlesque) du pansement humain ! C’est donc venu d’une envie de parler de ces villes conservatrices en y amenant une touche cartoonesque. De les personnifier, les rendre vivantes et poétiques. Le meilleur des spots pour ce projet, c’est quand je trouve une cohabitation entre deux bâtiments, un figé et intemporel, avec à côté un immeuble qui subit les fractures du temps pour que je puisse le réparer.
> Quels matériaux utilises-tu ?
Les pansements sont à la base des sculptures en terre que j’ai ensuite moulé puis tiré en résine. Je les fixe aux murs avec une colle à scellement basique. En ce moment, je suis en train de bricoler une perche télescopique pour les mettre plus haut qu’avec l’échelle pour éviter qu’on les subtilise trop facilement.
> Comment se déroule une intervention ?
Tout commence par le repérage d’une fissure naturelle. Selon le contexte, j’adapte mon intervention. J’ai en atelier 5 tailles de pansements. En fonction du lieu, de la fissure et des proportions, je vais faire un choix esthétique pour m’intégrer au mieux dans le paysage : 3 petits, 1 gros, 2 moyens… Quand je suis décidé sur la taille et le nombre, direction l’atelier pour préparer la résine (polyuréthane) et la coulée dans les moules, je laisse ensuite sécher la nuit. Je reviens le lendemain, pour la phase peinture (acrylique). En gros, il faut compter 2 à 3 jours entre la rencontre avec la fissure et son colmatage. Une fois collé au mur, j’effectue une prise photographique immédiate. Pour certaines zones risquées, je pose de nuit et je reviens le lendemain matin pour les photographier. Il faut savoir que la principale contrainte de ce projet est de trouver des fissures assez grandes, car en réalité les villes ne laissent pas souvent les bâtiments jusqu’à se fendre. Donc je ne suis pas trop gourmand. Je m’y atèle quand je trouve une fissure qui me plaît !!
> D’où t’es venu l’envie d’exposer les traces de ton projet ?
Dès le départ, je prenais en photo mes graffs et pochoirs de lycée. Pas seulement avec des plans rapprochés, mais plutôt avec des vues globales qui permettaient d’apprécier l’ensemble du contexte. J’ai développé cet intérêt pour la photo, car elle permet d’exposer différents points de vue, tout en partageant ce que l’on a envie d’exprimer. Avec le temps, les gens autour de moi m’ont incité à montrer mon travail. La rencontre avec le Label NAU a alors été un élément déclencheur.
> Que représente le Label pour toi ?
Déjà de rencontrer d’autres artistes, ça permet de ne pas rester seul. C’est aussi un moyen d’offrir une visibilité à notre travail, une opportunité de montrer et d’archiver nos créations. Et enfin, surtout, de mettre un nom et une définition sur ce mouvement artistique que nous représentons.
EN LIEN AVEC CET ARTICLE
ŒUVRES ⇒ Liste des œuvres enregistrées pour ce projet
SITE DE L’ARTISTE ⇒ http://www.jim-urbanproject.com/
VIDÉO ⇒ Voir la pose du pansement en vidéo